Village de Lachau
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Vue du chateau et de l'église © Dobeuliou
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Le buste de Marianne

Dans la salle du conseil municipal de la commune de Lachau trône un buste de Marianne datant de 1893 alors que la coutume d'installer un buste de Marianne dans les mairies s'est généralisée à partir de 1875.  (Merci à Sophie Audibert et Monique Amic pour leurs informations).

Qui a réalisé ce modèle de cette Marianne ?
Le modèle de cette Marianne de Lachau a été réalisé par le sculpteur Jean-Antoine Injalbert (Béziers 1845 - Paris 1933) à l'occasion du centenaire de la Révolution en 1889. Ce modèle qui a été l'un des plus diffusés de la IIIe République a connu un très grand succès. Il a été réalisé à une très grande échelle pour les mairies, les écoles, les bâtiments publics ainsi que pour les places publiques où certains se trouvent encore. Ces bustes ont été sculptés en pierre, en bronze et/ou en fonte.

Présentation de Jean-Antoine Injalbert et de son œuvre.
Fils d'un tailleur de pierre, après avoir passé son enfance à Béziers il entre à l'École des beaux-arts et devient un adepte de l'art néo-baroque. Son œuvre prolifique qui a irrigué plusieurs grandes villes (notamment Paris et Montpellier, mais aussi Toulon, Reims, Tours, Béziers) est constituée de différentes sculptures : statues, figures, frontons, monuments aux morts, bas-reliefs de pont, tympan de chapelles et d'églises...
A ce titre, il a été récompensé par le prix de Rome en 1874 et il a exposé une partie de ses œuvres lors des Expositions universelles à Paris en 1878 et en 1889. Lors de cette dernière il a obtenu un grand prix.
Un grand nombre de ses œuvres se trouve au musée des beaux-arts de Béziers à la suite de la donation du fonds de son atelier par sa veuve en 1934 et à la villa Antonine (Béziers) où il avait son atelier.


Présentation du buste de Marianne de Jean-Antoine Injalbert.
La tête légèrement tournée vers la droite et vers le haut, ce buste lui donne un air altier. La chevelure est presque toute retenue dans le bonnet phrygien dont le pli supérieur et la cocarde sont très accentués.

D'où vient le prénom de Marianne ?
Le prénom Marianne est la contraction de Marie et Anne, les 2 prénoms les plus répandus au XVIIIe siècle à la campagne et parmi les domestiques des nobles.
Mathilde Larrère, historienne spécialiste des mouvements révolutionnaires, enseignante et chercheuse à l’UPEM (Université Paris-Est Marne-la-Vallée), précise que : « Marie est le prénom de la Vierge et Anne celui de sa mère : il était courant de donner des prénoms de Saints dans les milieux populaires ».
L'historien Maurice Agulhon (1926-2014) prête à Marianne une origine antérieure. Le prénom proviendrait de celui de Marianne, une princesse juive antique dont de nombreuses pièces de théâtre au XVIIIe siècle racontaient l’histoire comme La Marianne de Tristan L’Hermite (1636) et Hérode et Marianne de Voltaire (1724). Marianne, princesse hasmonéenne contrainte d’épouser le roi juif Hérode Le Grand a été persécutée puis exécutée sur ordre de son époux. Le prénom Marianne était donc déjà connu lors de la Révolution, mais dans des milieux plus élitistes.

Origine et historique de Marianne.
En France, l’utilisation d’une femme comme figure allégorique et symbolique de la Liberté, la Révolution et la République trouve son origine lorsque la Convention a décidé avec le décret du 22 septembre 1792, sur la proposition de l’abbé Grégoire chargé d’un rapport sur les sceaux de la République, d’associer le nouveau régime républicain à l’image d’une femme : « Le sceau de l’État sera changé et portera pour type la France sous les traits d’une femme vêtue à l’antique, debout, tenant de la main droite une pique surmontée du bonnet phrygien, ou bonnet de la liberté, la gauche appuyée sur un faisceau d’armes ».
A noter que le sein nu de la Marianne est le symbole d'une « République nourricière » ♦ confer le tableau ci-contre.
Marianne disparaît sous le Consulat, le 1er Empire, la Restauration (1815-1830) pour réapparaître publiquement dans le tableau de Delacroix « La liberté guidant le peuple » qui témoigne avec fougue des terribles journées de 1830 (les Trois Glorieuses – 27, 28 et 29 juillet 1830) ♦ confer le tableau ci-contre.
► voir une explication du tableau de Eugène Delacroix (1798-1863) : « La Liberté guidant le peuple ».

Disparue sous le Roi Louis-Philippe (1830-1848) et Napoléon III (1852-1870) qui imposait ses portraits sous le 2nd Empire et malgré une courte interruption sous la IIe République (1848-1851), Marianne s'affirme naturellement sous la IIIe République et devient le symbole du parti de la République contre le parti monarchiste et conservateur.

La Marianne du sculpteur Jean-Antoine Injalbert, dont un modèle est présent dans la salle du conseil municipal de Lachau, présente des traits de robustesse et de vigueur et elle est plus combative que nombre des autres représentations de ce symbole.
Ce sont les raisons pour lesquelles le gouvernement de Vichy a décidé de retirer toutes les Mariannes de tout l'espace public et que le profil du maréchal Pétain chef de l’État français a remplacé celui de Marianne symbole de la République française. Bien des statues de Marianne en métaux ferreux ont été alors envoyées à la fonte et les bustes en matière pierreuse ont été remisés au placard ou détruits pendant la période de l’État français (1940-1944).
Mais avec le retour de la IVe République, à la libération de la France en 1945, Marianne retrouve sa place, comme ce fut le cas à Sierentz en Alsace où 2 prisonniers allemands remettent en place le buste de la République (modèle de Jean-Antoine Injalbert) après 4 longues années d'absence ♦ voir la photo ci-contre.
En outre, selon une anecdote, un buste de Marianne aurait été dissimulé en octobre 1939 par la municipalité de Volmerange-les-Mines (Moselle) avant l'évacuation du village vers la Vienne pour être réinstallé à la Libération dans la salle des mariages.

Quels sont les attributs de la Marianne de Lachau ?
Marianne qui arbore sur sa poitrine un bustier à écaille orné d'un mufle de lion symbolisant la force du peuple porte le bonnet phrygien avec ses pans relevés et une cocarde sur le coté.

D'où vient le bonnet phrygien ?
Le bonnet phrygien, considéré traditionnellement d'origine antique anatolienne et plus précisément de Phrygie (centre de l'actuelle Turquie), tire sa symbolique de liberté et de ressemblance avec le pileus (chapeau en latin) qui coiffait les esclaves affranchis de l'Empire romain.
Le bonnet phrygien appelé « bonnet de la liberté » qui est un couvre-chef (ou coiffure) souvent de couleur rouge (symbole révolutionnaire) est une des images de la République française et l'un des attributs de Marianne mais il est aussi affiché à l'étranger notamment :

  • sur des armoiries des pays d'Amérique latine (Brésil, Cuba, Argentine, Nicaragua...) suite à l'accès à leur indépendance vis à vis de l'Espagne dans les années 1820,
  • sur des affiches patriotiques des États-Unis pendant la guerre d'Indépendance du XVIIIéme siècle (il est toujours présent sur le drapeau de l’État de New York),
  • sur des dessins de presse politique au début du XXéme siécle représentant Columbia qui est une figure allégorique des États-Unis, l'équivalent féminin de l'Oncle Sam,
  • sur les têtes des Patriotes canadiens français du Québec lors de la rébellion de 1837-1839,
  • accessoirement sur de la vaisselle commémorant l'abolition de la traite des esclaves par le Parlement britannique en 1807.

D'où vient la cocarde tricolore ?
L’origine de la cocarde tricolore remonte aux prémices de la Révolution française. Le 12 juillet 1789, à l’appel de Camille Desmoulins qui harangue les passants dans les jardins du Palais royal, des patriotes qui protestent contre le renvoi de Necker adoptent la cocarde verte comme signe de reconnaissance mais cette couleur est vite abandonnée.
Le lendemain, les membres de la milice bourgeoise qui s’assemblent pour constituer la garde nationale arborent une cocarde bleue et rouge pour manifester le caractère militaire de leur mission. Cet insigne est apparue ambiguë pour rassembler la population : par un « singulier hasard », comme le note le Marquis de Lafayette, le bleu et le rouge sont à la fois les couleurs de Paris, celle de la livrée des serviteurs du duc d’Orléans, l’ambitieux cousin de Louis XVI.
Dès le matin du 14 juillet 1789, plusieurs contemporains ont noté voir fleurir dans Paris des cocardes bleues, blanches et rouges sans que l'on en connaisse l'inventeur et comment celle-ci fut fabriquée (confer l'article « Les trois couleurs de 1789 » de Hervé Pinoteau dans le bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France - 1992).
Trois jours après la prise de la Bastille, le roi Louis XVI est reçu à l’Hôtel de Ville par Bailly qui vient d’être élu maire de Paris et se voit remettre une cocarde tricolore par le Marquis de Lafayette commandant de la garde nationale. Celui-ci écrit dans les mémoires qui ont bâti sa légende qu’il tendit le fameux insigne au roi en déclarant : « Je vous apporte une cocarde qui fera le tour du monde ».

Marianne : un élément du patrimoine.
Le département du Rhône et la Métropole de Lyon se distinguent comme des collectivités locales à conserver des bustes de Marianne datant de la Première République classés Monuments historiques au titre des objets mobiliers.
Ces effigies sont conservées dans les communes de Couzon-au-Mont d'Or, Létra, Soucieu-en-Jarrest et Sourcieux-les-Mines.
A l'occasion des Journées européennes du patrimoine 2016 dont le thème était « Patrimoine et citoyenneté », les archives départementales et de la Métropole ont organisé une exposition « Territoires citoyens » interrogeant les liens entre les circonscriptions administratives et leurs habitants. Dans ce cadre, a été présentée la Marianne de Sourcieux-les-Mines classée Monuments historiques par arrêté en date du 5 décembre 1996. Cette Marianne a bénéficié d'une restauration financée par le Département du Rhône et confiée à Irène Bordereau, restauratrice spécialisée dans le domaine de la sculpture, sous le contrôle scientifique et technique de la conservation régionale des monuments historiques (DRAC Auvergne-Rhône-Alpes).
En outre, soucieux de compléter sa collection de Marianne anciennes ou contemporaines, le Sénat a acquis de 2000 à 2006 une partie des pièces rassemblées par M. Pierre Bonte (journaliste). Depuis, cette collection est exposée en plusieurs endroits du palais du Luxembourg et certaines de ses œuvres sont prêtées ponctuellement à différentes institutions.

Est ce que la Marianne a un statut officiel ?
Contrairement à la croyance populaire aucun buste officiel de Marianne n'existe.
En 1848, la courte IIe République revenant au pouvoir a tenté de créer un modèle officiel de Marianne sur la base du buste réalisé par le sculpteur Vital Dubray (voir photo ci-contre) et de codifier ses symboles révolutionnaires mais sans avoir eu le temps d' y parvenir compte tenu du coup d’État du 2 décembre 1851 de Louis-Napoléon Bonaparte et aussi par respect des libertés des collectivités locales.
Si des célébrités artistiques (Brigitte Bardot, Catherine Deneuve, Lætitia Casta...) ont prêté leurs traits à des sculptures sans obligation, il n'existe pas de modèle officiel de Marianne tout en précisant que l'association des maires de France (AMF) choisit régulièrement d'illustres Françaises pour prêter leurs traits à Marianne. 

C.A.M.

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