Village de Lachau
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Vue du chateau et de l'église © Dobeuliou
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Paul, Bernard Audibert : un vétéran militaire de Lachau chevalier de la Légion d'Honneur.

Paul, Bernard Audibert qui est le père du soldat Charles Audibert qui participa à la campagne à Madagascar en 1895 (voir article ci-dessus), est né le 19 août 1827 à Lachau. Il est le fils de Joseph Audibert (cultivateur né en 1796) et de Jeanne Marie Brissac, tous les deux domiciliés à Lachau.

► voir son acte de naissance

Paul, Bernard Audibert, veuf de Anne Payet décédée à Aix-en-Provence le 16 juin 1861, se marie le 24 juillet 1866, sur autorisation de l'intendant militaire d'Alger, devant le Maire de Lachau, Pierre Jarjaye, avec Eugénie, Rosine Pellegrin née le 14 décembre 1849 à Lachau et fille de Etienne Pellegrin (cultivateur) et de Sophie Audibert domiciliés à Lachau.


Services militaires de Paul, Bernard Audibert.
Rappel historique 
: les conditions du recrutement des conscrits qui sont définies par les lois du 10 mars 1818 (loi Gouvion-Saint-Cyr) et du 21 mars 1832 (Loi Soult) ont mis en place un dispositif très particulier et inégalitaire.

Recensement : chaque année, les effectifs des hommes de 20 ans sont répartis entre les départements, les arrondissements et les cantons qui doivent fournir un nombre de soldats en proportion de leur population et en tenant compte de l'estimation des volontaires s'engageant dans l'armée cette année-là en se basant sur leur nombre dans l'année précédente. Cette opération suppose de faire un recensement annuel de tous les hommes de 20 ans appartenant à une classe d'incorporation à la fin de l’année de leurs 20 ans. Paul, Bernard Audibert est de la classe 1847 et le recensement de sa classe d'âge a eu lieu en décembre 1847. Dans le cadre de ce recensement, le maire de chaque commune établit une fiche de renseignements pour chaque jeune homme qu'il envoie à la préfecture.

Tirage au sort : en janvier-février de l’année suivant celle du recensement, ces jeunes hommes accompagnés des maires se rendent, le plus souvent à pied, au chef-lieu du canton (pour Paul, Bernard Audibert, c'est donc Séderon) où est procédé le tirage au sort. (voir ci-contre l'illustration d'un défilé de conscrits de village accompagnés par la fanfare et le porte-drapeaux : ils sortent de la brasserie en emportant chacun une bouteille de vin)
Lors de la séance de recrutement qui a lieu en public et qui est présidée par le sous-préfet de l'arrondissement, les maires des communes du canton ceints de leur écharpe tricolore lui présentent leurs tableaux de recensement avec les demandes d’exemptions et/ou de dispenses des jeunes hommes qui fournissent, à l’appel de leur nom, les pièces nécessaires.
À l'issue de cette présentation, sont effectués 2 tirages au sort qui sont les suivants :

  1. le premier détermine l’ordre dans lequel les communes vont être appelées,
  2. puis, pour chaque commune, les hommes sont appelés dans l’ordre alphabétique pour le tirage au sort d’un numéro qui permet de les classer et les répartir dans 2 portions :
    • la première portion contient les petits numéros dits les “mauvais numéros” : ces hommes feront le service militaire complet jusqu’à 8 ans selon les années – pour Paul, Bernard Audibert c'est 6 ans,
    • la deuxième portion contient les plus gros numéros dits les “bons numéros” - ces “chanceux” pourront ne faire que 1 an de service militaire, voire seront libérés définitivement de toute obligation militaire.

Sur la liste nominative, le numéro tiré est inscrit en face du nom du jeune homme. En même temps, le nom du jeune homme est inscrit sur une liste numérotée en regard du numéro tiré et sur laquelle sont reportées également les possibilités d'exemption ou de dispense de service – ceci permettant de connaître au fur et à mesure du tirage le nombre de postes à pourvoir en fonction de l'effectif demandé.
Toutefois et bien souvent, le 2nd tirage au sort est poursuivi parfois jusqu'au nombre double de celui de l'effectif exigé du canton compte tenu des éventuelles réclamations de ceux qui ont tiré le « mauvais numéro », des exemptions et des dispenses. Si certaines réclamations sont acceptées, les places des bénéficiaires de la mesure sont attribuées aux suivants sur la liste de tirage au sort. (♦ voir ci-contre l'illustration montrant le passage d'un conscrit obtenant le numéro 179 au tirage au sort)

Paul, Bernard Audibert est inscrit sous le n° 383 de la liste du Contingent du département de la Drôme.

Une circulaire ministérielle fixe chaque année le contingent appartenant à la 1ère portion et à la 2ème portion. Cette information est transmise par la préfecture aux mairies du département qui doivent ensuite informer les futurs appelés par voie d'information écrite (affichage) et orale pour ceux qui ne savent pas lire. C'est ainsi que les jeunes hommes ne sont officiellement informés que fin août, soit à peine un mois avant la confirmation de l’appel sous les drapeaux. L’attente devait vraiment être longue pour ces jeunes hommes ! 

Conseil de révision. Dans chaque département siège un conseil de révision institué par le Décret impérial du 29 août 1805 présidé par le préfet auquel participent les représentants des conseil général et d’arrondissement et un officier général ou supérieur. Se déplaçant dans les différents cantons, il est assisté d’un membre de l’intendance militaire, du commandant du recrutement et d’un médecin militaire, voire civil. Pour chaque canton est dressée une liste du recrutement indiquant les conscrits bons pour le service, les engagés volontaires, les dispensés et les ajournés. Le commandant de recrutement dresse les registres matricules des jeunes hommes à partir de cette liste.
La venue dans le canton du conseil de révision qui peut faire l’objet d’un cérémonial (fanfare municipale, cortège, haie d’honneur...) est un moment important à la fois pour les jeunes hommes et pour les communes. Les jeunes hommes sont invités à se présenter devant la mairie du chef-lieu de canton au moins 10 minutes avant l’heure de la convocation. Ensuite, c’est le passage devant le conseil de révision qui est public et les maires des communes du canton qui y sont présents peuvent faire des observations. Les jeunes hommes qui passent nus devant le médecin sont appelés dans l'ordre du tableau de recensement et le conseil de révision qui statue également sur les substitutions de numéros et les demandes de remplacement écoute leurs demandes et leurs observations.
Outre l'inscription des données morphologiques du visage des jeunes hommes, leur taille est vérifiée mais les toises n’ayant pas toujours été d’une grande précision, une circulaire du ministère de la guerre intervient au début du 20ème siècle pour imposer des toises graduées. La vérification de la taille n’a qu’un but statistique jusqu’à la loi du 2 avril 1901, une taille minimale était exigée : 1,54 m. En deçà, pas de service militaire. (♦ voir illustration ci-contre)

Données morphologiques de Paul, Bernard Audibert déterminées au moment du conseil de révision :

taille visage front yeux menton nez cheveux sourcils
1,63 m ovale couvert gris rond gros châtains châtains

Alors qu'il est étudiant, Paul Bernard Audibert est incorporé le 22 juin 1848. Avec sa famille, il n'a pas fait valoir la possibilité de son remplacement institué par les lois sur le recrutement de l'armée du 10 mars 1818 (loi Gouvion-Saint-Cyr) et du 21 mars 1832 (Loi Soult) qui consiste à verser une compensation financière à la famille du remplaçant.

Les années de service militaire actif de Paul, Bernard Audibert.
Paul, Bernard Audibert, qui est appelé pour un service militaire de 6 ans en tant que conscrit, choisit de devenir un soldat de métier en signant plusieurs contrats de rengagements qui sont les suivants :

Durée du service Date de début du service
Appelé pour 6 ans 22 juin 1848
Rengagé pour 2 ans le 31 décembre 1854
à compter du 1er janvier 1855
Rengagé pour 7 ans le 25 août 1855
contrat qui annule celui du 31 décembre 1854
Rengagé pour 5 ans le 21 décembre 1861
à compter du 1er janvier 1862
Rengagé pour 7 ans le 22 mai 1866
à compter du 1er janvier 1867

À ce titre, Paul, Bernard Audibert a été incorporé dans les différentes formations sanitaires militaires suivantes :

Formation sanitaire militaire Date Décision ministérielle
Section des infirmiers militaires de Lyon (Fort de Sainte-Foy-lès-Lyon) 22 juin 1848 comme appelé
Section des infirmiers militaires de l'hôpital militaire de Marseille1
(voir photos ci-contre)
31 août 1849 comme appelé
Section des infirmiers militaires à l'hôpital de la division militaire d'Alger2
(voir photos ci-contre)
30 janvier 1858 décision ministérielle du 21 janvier 1858
Section des infirmiers militaires du Corps expéditionnaire du Mexique 4 juillet 1862 comme détaché, et ayant débarqué au Mexique le 17 janvier 1863
9ème section des infirmiers militaires à l’hôpital militaire de la division militaire d'Alger2
(voir photos ci-contre)
31 mars 1864 décision ministérielle du 16 mars 1864


Évolution des grades de Paul, Bernard Audibert.
Qui étaient les infirmiers militaires
3 ?
Au 19éme siècle, il y a 2 types d'infirmiers qui sont les suivants :

  • ceux affectés au service militaire dans les unités de l'armée : Paul, Bernard Audibert en fait partie à Lyon de 1848 à 1849 et lors de l'expédition au Mexique de 1862 à 1864,
  • ceux affectés au service hospitalier : Paul, Bernard Audibert en fait partie à Marseille de 1849 à 1858 et à Alger de 1858 à 1862 et de 1864 à 1873.

Les prescriptions paramédicales des infirmiers militaires qui sont subordonnés à l'intendance militaire se limitent vers 1840 aux lotions, frictions, embrocations. L'essentiel des actes simples de soins y compris les pansements est confié aux chirurgiens sous-aides.
Mais suite aux différentes expéditions militaires du 2nd Empire (notamment en Crimée 1854-1856) est progressivement créé un corps d'infirmiers professionnels spécialisés appelés couramment « soldats panseurs » en charge de la « tenue des cahiers de visite et du renouvellement des pansements simples ».

Ceci explique les changements de grade de Paul, Bernard Audibert à compter du 31 mars 1864.
 

Grade Date Décision
2ème classe 22 juin 1848 comme appelé
1ère classe infirmier militaire 2 septembre 1852 comme appelé
Caporal infirmier major 10 mars 1854 décision ministérielle du 8 mars 1852
Sergent infirmier major 22 septembre 1854 décision ministérielle du 20 septembre 1854
Sergent 31 mars 1864  
Sergent de 2ème classe 19 mai 1864  
Sergent de 1ère  classe 11 août 1864  

Campagnes militaires de Paul, Bernard Audibert. 
Outre les 10 années passées en métropole (de 1848 à 1858), il a effectué 15 années de sa carrière en outre-mer (Algérie et Mexique) comme le met en évidence le tableau ci-dessous :
 

Pays Date de départ Date de fin Durée des campagnes
Afrique du nord (Algérie) 1er février 1858 3 juillet 1862 4 ans 4 mois 3 jours
Mexique 4 juillet 1862 31 mars 1864 1 an 9 mois 4 jours
Afrique du nord (Algérie) 19 mai 1864 12 juillet 1873 8 ans 11 mois 1 jour
Total de la durée des campagnes outre-mer     15 ans et 8 jours

Campagne d'Algérie4
Rappel historique : la politique algérienne de Napoléon III est certes coloniale mais elle se distingue par son humanisme, sa justice et son respect à l'égard de la population autochtone appelée « indigène ». L'Empereur tente par tous les moyens de concilier les habitants de l'Algérie en leur attribuant les mêmes droits, tâche ô combien difficile pour un homme qui veut être le souverain de tous les Algériens : Chrétiens, Musulmans et Juifs. Aussi veut-il faire de l'Algérie un exemple de réussite de sa stratégie méditerranéenne et du rayonnement de la France et construire une haute diplomatie sous l'égide du leadership arabe qu'il incarne en portant le titre de « Sultan des Arabes » du Maghreb (Couchant) au Machrek (Levant ou Orient arabe). Mais ce projet n'aboutira pas compte tenu de la réponse négative de l’Émir Abd-el-Kader5 (♦ voir illustration ci-contre), de l'hostilité des colons et de l'attitude passive voire insurrectionnelle des indigènes malgré son 2ème voyage en 1865 en Algérie (♦ voir illustration ci-contre).

Campagne du Mexique.
Rappel historique : après avoir triomphé en 1856 au congrès de Paris qui met fin à la guerre de Crimée, Napoléon III forme le projet de renverser le président mexicain Benito Juarez et de transformer le Mexique en un empire latin et catholique pour différentes raisons :

  • remboursement de la dette du Mexique envers la France selon les conseils du Duc Charles de Morny,
  • développement de l'influence de la France en terre hispanique et catholique face à l'Amérique du nord anglophone et protestante selon les conseils de son épouse, l'Impératrice Eugénie.

Mais cette « plus grande pensée du règne » va sombrer dans le drame et dans une défaite militaire qui se solde par le rapatriement en catastrophe du corps expéditionnaire en 1866 . (♦ voir illustration ci-contre)

Les Décorations de Paul, Bernard Audibert.
Les services émérites, notamment outre-mer de Paul, Bernard Audibert dans l'armée ont été récompensés par la remise des 3 décorations importantes qui sont les suivantes (♦ voir les illustrations de médailles ci-contre) :

Décoration militaire Instituée par Délivrée par Montant annuel de la rente à l'époque
Médaille militaire Décret Impérial du 22 janvier 1852 Décret Impérial du 14 août 1863 100 francs
(soit 327 € actuels)
Médaille commémorative du Mexique Décret Impérial du 29 août 1863 Décision ministérielle du 16 mars 1864 sans objet
Légion d'Honneur Loi du 9 prairial an X
(29 mai 1802)
Décret du 27 juin 1872 250 francs
(soit 817 € actuels)

À l'occasion de la remise des premières Médailles militaires, voir ci-dessous un extrait du discours de Napoléon III, le 22 mars 1852, face au carrousel du Louvre, qui s'adresse aux 48 premiers récipiendaires qui se sont distingués au cours des campagnes d'Algérie :
« […] Combien de fois ai-je regretté de voir des soldats et des sous-officiers rentrer dans leurs foyers sans récompense, quoique par la durée de leurs services, par des blessures, par des actions dignes d’éloges, ils eussent mérité un témoignage de satisfaction de la patrie ! […] C'est pour le leur accorder que j'ai institué cette médaille […]. Elle assurera 100 francs de rente viagère ; c'est peu, certainement ; mais ce qui est beaucoup, c'est le ruban que vous porterez sur la poitrine et qui dira à vos camarades, à vos familles, à vos concitoyens que celui qui la porte est un brave. »

► Exemple de diplôme de la Médaille militaire sous le Second Empire
► Exemple de Médaille attribuée avec un diplôme aux 38 000  hommes du Corps expéditionnaire au Mexique.

Plus particulièrement, Paul, Bernard Audibert est fait chevalier dans l'ordre de la Légion d'Honneur en 1872 – ce qui fait de lui l'une des 3 personnes nées à Lachau ayant reçu cette dignité nationale avec Pierre Émile Armand né le 6 août 1867 et Joseph Gustave Martin né 4 décembre 1883 qui sont des anciens combattants de la 1ére guerre mondiale de 1914-1918.

► voir le procès-verbal de réception de la Légion d'Honneur de Paul, Bernard Audibert

Paul, Bernard Audibert quitte le service militaire actif le 31 décembre 1873 après avoir passé plus de 25 années dans l'armée de la IIème République, du 2nd Empire et de la IIIème République.

Retraité militaire en décembre 1873, il se retire à Alger puis à Carpentras où naît en 1874 son fils Charles Audibert (décédé le 7 novembre 1895 à l’hôpital militaire du Dey à Alger, à la suite de la Campagne à Madagascar de 1895).

Puis, il exerce les fonctions de Commissaire de police à Aubin (Aveyron) de 1880 à 1887, année à partir de laquelle il se retire à Lachau.

Paul Bernard Audibert décède à Lachau le 9 juillet 1906 à l'âge de 79 ans.
► voir le certificat de décès relatif à la Légion d'Honneur

C.A.M.

 

1 L’hôpital militaire de Marseille est créé sur décision du Maréchal Soult en 1848 au 84 rue de Lodi dans le 6e arrondissement de Marseille, il porte à partir de 1913 le nom du médecin-général Michel Lévy, est cédé en 1963 à l’Assistance publique des hôpitaux de Marseille, puis vendu en 1987 et remplacé en 1988 par un complexe immobilier.

2 Ancienne résidence du Dey (titre des souverains de la régence d'Alger sous l'autorité nominale de l'Empire ottoman de 1671 à 1830) transformée sur ordre du général Rovigo, le 18 juillet 1832, en hôpital militaire et progressivement agrandi et perfectionné en 1833 par le chirurgien Baudens, en 1836 sur ordre du général Clauzel, en 1852 par le maréchal Randon. En 1962, c'est un hôpital militaire algérien.

3 Référence : actualisation d’un article publié pour la première fois dans la Revue Médecine et Armées, n° spécial « Tricentenaire du Service de santé des armées », t. XXXVI, n°5, déc. 2008, p. 497-505, ill. Sous le titre : « Paramédicaux dans les armées. Trois siècles pour parvenir au statut des Militaires infirmiers techniciens des hôpitaux des armées (1708-2008) »

4 Confer : La rédaction du magazine Napoléon III son hors-série n°5 : L’Algérie sous le Second Empire. Avril 19, 2019.

5 Immédiatement après son coup d’État, Napoléon III fit remettre en liberté Abd-el-Kader, ancien ennemi de la France.

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